Propos recueillis par Denis Nkwebo (Quotidien Mutations)
Dans le cadre de la réforme de la loi électorale, un Comité s’est constitué à Buea et milite pour la participation des candidats indépendants dans le processus électoral.
Quelle est l’origine du comité pour la participation des candidats indépendants dans le processus électoral au Cameroun et quels en sont les objectifs?
Notre comité est composé d’un groupe d’observateurs politiques passionnés, qui depuis les années 90, ont contribué au processus démocratique au Cameroun. Attiré par notre vision patriotique pour une démocratie vibrante et viable, ainsi que le développement durable au Cameroun, nous nous sommes réunis il y a quelques mois pour débattre sur le concept de la candidature indépendante au Cameroun. Comme vous le savez peut-être, l’idée d’une candidature indépendante n’est pas nouvelle.
En fait, nous saluons l’initiative personnelle et courageuse de notre compatriote Abel Eyinga à cet égard. Comme je le disais tantôt, le projet n’est pas nouveau ni au Cameroun, ni en Afrique. Le but principal du comité c’est de relancer ce débat sur la participation des candidatures indépendantes et plaider pour leur insertion comme une option alternative dans notre processus démocratique pendant les élections législatives et municipales de 2007, et l’annulation de la condition de 300 signatures en vigueur pour l’inscription des candidats indépendants aux élections présidentielles.
Jusqu’ici, les candidatures indépendantes étaient possibles aux élections présidentielles. En quoi l’extension aux scrutins municipaux et législatifs serait-elle une avancée?
Même si les candidats indépendants pouvaient participer aux élections présidentielles, la condition de 300 signatures ne leur était pas favorable. C’est justement le cas d’Onana Marcus qui fut disqualifié en 1997 parce qu’il ne put réunir 300 signatures des dix provinces. La seconde tentative fut à l’élection de 2004 où tous les six candidats indépendants furent disqualifiés pour diverses raisons parmi lesquelles, leur incapacité à réunir chacun, 300 signatures des dix provinces. Ainsi, logiquement parlant, les candidats indépendants n’ont jamais été mis sur un pied d’égalité avec les candidats des partis politiques.
En ce qui concerne leur participation éventuelle aux élections municipales et législatives, un système d’élection centré sur le candidat permettra à l’électorat de viser le mérite individuel et les opinions philosophiques et politiques indépendantes. En plus, un système électoral fondé sur le candidat améliorera la compétition et agrandira l’espace démocratique au Cameroun. Et comme vous le savez, jusqu’à maintenant, les élections à tendance partisane ne favorisent qu’une vieille génération qui monopolise l’arène politique au Cameroun.
La candidature indépendante peut donner à la jeune génération l’occasion de valoriser une nouvelle vision et un ordre du jour frais pour le corps politique de notre pays. En effet, la candidature indépendante est maintenant perçue comme un antidote à la politique gérontocratique, et un rite de passage vers la démocratie générationnelle
Quelles seraient éventuellement les références politiques et idéologiques des candidats indépendants?
Dans un sondage d’opinion récent en Europe, 22% des personnes interrogées étaient favorables aux partis politiques avec l’argument que les partis pensent plus à leurs survies q’aux questions particulières liées aux aspirations des électorats. Il y a aussi lieu d’ajouter que la plupart des partis au Cameroun n’ont pas pu développer un programme avec une vision nationale. Les candidats indépendants peuvent se libérer de la fermeture des partis politiques pour focaliser sur les besoins réels des peuples.
Vous militez donc pour la dépolitisation des masses?
Au contraire la candidature indépendante sert à valoriser d’abord la liberté individuelle, à mettre en évidence qu’un groupe où parti peut avoir tort et noyer le pays qu’il ne le sauve, et le plus important, donner à la masse plus des choix politiques afin de réaliser les buts démocratiques. La politique ne se résume pas seulement en établissant des partis où en organisant les élections. Elle concerne surtout le développement économique d’un pays. Nous ne réclamons pas un système de democratie sans parti, même avec ses mérites, comme ce fut le cas en Ouganda entre 1986-2006, mais nous exigeons un système pluraliste et complémentaire qui réunit et les loyalistes des partis et les indépendantistes sur la même plate-forme démocratique.
Quelles réactions avez-vous reçues des autorités et de l’opinion publique?
Nous n’avons pas encore eu une réponse ni du Président de la République à qui nous avions adressé le mémorandum, ni aux services diplomatiques qui ont reçus copies. Mais sachant la manière méticuleuse dont sont traités les courriers à la Présidence de la République, nous sommes confiants quant à une réponse éventuelle.
Mais permettez-moi de dire que les articles 2.1, 2.2, 5.5, et 20.3 de la constitution de 1996 sont favorables à la candidature indépendante. Comme on pouvait s’y attendre, les réactions du public ont été aussi nombreuses que diverses, et à juger par l’avalanche des courriers et appels que nous recevons, nous pouvons dire avec certitude que le débat vient de commencer.
Enfin nous sommes ravis de constater que le code électoral que vient de publier la Conférence Episcopale Nationale parle de la participation des candidats indépendants dans des différentes échéances électorales. En même temps le projet de loi sur les élections des Sénateurs et Conseillers Régionaux qu’on vient de soumettre à la présente session du parlement parle d’un pourcentage des candidats émanant de la société civile.
Je peux donc conclure que le principe de la candidature indépendante dans notre processus électoral est un fait accompli, tout ce que nous demandons maintenant est que cela soit clairement gravé dans notre code électoral.
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